True Blue est à Madonna ce que
Thriller est à Michael Jackson.
True Blue, l'album de tous les records est celui qui l'a haussé au rang de superstar et d'idôle. Madonna surfait encore sur ce que l'on pourrait aujourd'hui qualifier du "buzz" Like A Virgin. Ce précédent album l'avait pourvue d'une image de provocatrice un peu immature et éphémère, elle n'était toujours pas parvenu à convaincre les grands nantis de la critique musicale. "True Blue", expression qui signifie "fidèle" ou "loyal" va tout changer.
C'est en Décembre 1985 que Madonna, Stephen Bray et le formidable Patrick Leonard (auquel on devra par la suite Like A Prayer ou Frozen pour ne citer que les plus fameuses) commencent à travailler sur True Blue. Stephen Bray qui avait auparavant travaillé sur l'album Like A Virgin et des productions "Pré-Madonniennes" (Ain't No Big Deal...) est ré-embauché pour travaillé sur les morceaux uptempo et sucrés de l'album (Jimmy Jimmy, Where's The Party, True Blue). Patrick Léonard, qui d'après Madonna dans une interview en 1989 a un "amour de la mélodie, a travaillé pour les pistes mid et low tempo, musicalement plus complexes et romantiques (Papa Don't Preach, Live To Tell). Deux chansons ont été proposées à Madonna après avoir été rejetées par d'autres artistes, ainsi, c'est à Michael Jackson que "La Isla Bonita" était d'abord destinée, et c'est Cyndi Lauper qui aurait dû chanter "Open Your Heart". On peut facilement deviner que ces deux artistes ont amèrement regretté leurs choix par la suite.
True Blue fait musicalement un pied-de-nez à Like A Virgin. En plus des habituels Synthétiseurs et percussions synthétiques propre à la pop des années 80, s'ajoutent sur True Blue, des violons, de la musique classique et des instruments et rythmes cubains. Ainsi, True Blue s'intègre comme pièce maîtresse dans la New wave des eighties, tout en embrassant d'autres styles musicaux. Ainsi, Papa Don't Preach s'ouvre sur l'appassionatta sonata de Beethoven et La Isla Bonita arbore de la guitare espagnole, de l'harmonica, des maracas et autres percussions cubaines.
En
ce qui concerne les textes, Madonna, tout en conservant un aspect sucré et immature s'élève également en maturité dans certaines chansons. Live To Tell est sans nul doute
le texte le plus fort de l'album, et peut être la première production textuelle de Madonna qui se doit d'être appréciée comme telle. Le texte parle de la malhonnêteté, de
la déception liée au mensonge et à la difficulté de faire jour à la vérité. Musicalement, Live To Tell change de gamme plusieurs fois au cours du morceaux, faisant de
cette chanson une production très complexe, aux accents dramatiques, avec une montée divine et hantante sur la fin. Cette chanson, produite par Patrick Leonard et écrite entièrement par
Madonna a été proposée par cette dernière pour figurer sur la bande son du film "At Close Range" dans lequel jouait son amri Sean Penn. Le réalisateur, convaincu par la
première démo a par la suite engagé Patrick Léonard pour écrire la totalité de sa bande son, comme quoi, le piston, ca aide.
"Papa Don't Preach" traite de la grossesse chez une adolescente, ainsi, Madonna incarne une jeune fille de 17 ans qui avoue à son père qu'elle est enceinte d'un amant peu fréquentable. Madonna signe là encore un texte bien plus mature que ceux de l'époque Like A Virgin. Papa Don't Preach a été dénoncé par certaines associations comme se positionnant à l'encontre de l'avortement, a contrario, les associations pro-vie l'ont soutennu. Chose étrange, quand on sait que Madonna s'est toujours prononcée comme progressiste. Il semblerait plus sage d'y voir le message du courage de prendre une décision importante.
La Isla Bonita, d'après Madonna parle de la beauté et du mystère des latino-américains. Elle a co-écrit le texte après que celui ci ait été rejeté par Michael Jackson pour lui donner un point de vue féminin.
Les autres textes sont plus légers. Jimmy Jimmy parle de la fascination qu'elle éprouvait pour James Dean quand elle était plus jeune. Elle disait d'ailleurs que plus jeune, elle révait que James Dean également issu du mid-west vivait avec elle pendant son enfance avant de s'envoler vers la gloire, Madonna s'imaginait alors suivre son chemin et devenir une star à son tour. Where's The Party est un appel à la fête après le labeur quotidien, Love Makes The World Go Round, qui cloture l'album, est une chanson pacifiste, True Blue parle d'amour adolescente, Madonna signe le texte le plus subversif avec Open Your Heart, qui se situe habilement entre erotisme et amourette, White Heat enfin, est une métaphore entre une histoire de challenge amoureux et celle d'une aventure de gangster, d'ailleurs, la chanson sample des répliques du film du même nom datant de 1937.
En tout, ce sont 9 bijoux que nous propose la Madone, et c'est la que la consécration commence. Live To Tell sort en Mars 1986 et devient numéro un en 6 semaines,
Madonna, pour changer son image après l'époque sulfureuse de Like A Virgin, change complètement de look dans le clip, elle arbore de longues boucles blondes qui lui tombe
élégamment sur les épaules, habillée d'une robe à fleur dans un style que certains pourraient juger "conservateur" et très sobre, sans bijoux.
Pour une chanson aussi forte et lancinante, il faut des images sobres afin que l'attention soit posée sur le texte, ainsi, le clip présente des scènes de Madonna assise sur une chaise, sur un fond noir entrecoupées de scènes du film "At Close Range".
Papa Don't Preach devient le second numéro 1 de l'album et présente Madonna dans un look désormais iconique: cheveux platine courts mouillés ou en brushing et habillée d'un body pour les scènes de danse. Le clip illustre les paroles, Madonna jouant une jeune fille du bronx amoureuse d'un jeune homme duquel elle attend un enfant. Le clip montre intelligemment le passage brutal entre l'enfance et l'adolescence et les rapports étroits entretenus par un père et une fille.
L'album se lance avec un succès fou, en Novembre sort le sulfureux "Open Your Heart". C'est Jean Paul Gaultier qui créé alors une de ses tenues les plus mythiques: le corset au seins coniques. Madonna incarne une danseuse de peep show observée par des hommes plus ou moins étranges, dont un petit garçon qui semble lui vouer un véritable culte.
Ce clip, mettant en scène sans pudeur le voyeurisme et le voyeurisme infantile n'aura pas manqué de choquer les Américains puritains. Au final cependant, c'est Madonna qui semble retourner dans l'enfance en s'enfuyant avec le garçon.
True Blue, est une véritable machine à tubes, True Blue, titre de l'album éponyme avec un clip plus léger et très "girlie" comme le veut la chanson. La Isla Bonita qui clôt le marathon de tubes sort en 1987, c'est une déferlante qui s'abat sur l'Europe, un peu moins aux Etats Unis où le single arrive quand même dans le top 5. Le clip joue avec l'imagerie latine et religieuse.
Au final, True Blue entre dans la liste des 50 albums les plus vendus de l'histoire avec 24 millions de copies,
c'est l'album studio le plus vendu de Madonna (après The Immaculate Collection qui est une compilation), c'est aussi l'album qui bat le record du plus grand nombre
de pays dans lesquels il est au sommet des charts: 28 pays au total. C'est donc l'album de la consécration pour Madonna, album qui l'assoit au rang d'icône des années 80.
Le look de Madonna durant cette période a aussi accompagné cette transformation artistique. la pochette de l'album s'inspire une nouvelle fois de Marilyn Monroe et est une des photos les plus reconnaissables de Madonna. La peau blanche et les lèvres rouges, symbole de pureté et d'élégance, la tête en arrière, le cou contre un mur blanc, dans une innocence lascive, les cheveux platine courts en brushing, le tout pour une photo qui s'inspire fortement du pop art, où les contrastes forts sont soignés par une prédominance des gris et des bleus.
Une photo au plan plus large présente à l'intérieur des jaquettes la montre avec une veste en cuir noire ouverte, découvrant son épaule nue. D'autres photos du même photoshoot par Herb Ritts sont également restées dans les annales, représentant Madonna comme une icône à la racine de la divinité.
Pendant 2 ans, Madonna surfera sur la vague True Blue, son succès l'emmenant à jouer pour le film Who's That Girl et surtout à parcourir pour la première fois les route du monde pour la tournée "Who's That Girl Tour", où "True Blue" est représenté dans sa quasi-totalité (hormis Jimmy Jimmy). Madonna performera tour à tour plusieurs chansons de l'album True Blue au cours de ses tournées. La Isla Bonita sera la chanson la plus jouée de toute la carrière de Madonna, celle ci la remixant en version plus hispanisante (drowned world tour), ou en duo avec des groupes tziganes (sticky and sweet, live earth). Papa Don't Preach a été joué pendant le Re-Invention tour.

1. Papa Don't Preach
2. Open Your Heart
3. White Heat
4. Live to Tell
5. Where's the Party
6. True Blue
7. La Isla Bonita
8. Jimmy Jimmy
9. Love Makes the World Go Round
25 ans après, True Blue est toujours un des albums les plus importants dans le coeur des fans, témoin d'une époque où le monde entier tournait autour d'un phénomène fulgurant : Madonna.
Merci à Antoine !